La mort de Ben Laden ne me fait pas plaisir. Ce qui m'aurait fait plaisir, c'est que cet homme comprenne que le Dieu qu'il prétendait servir ne demande pas la mort d'innocents, mais la recherche de dialogue et de paix. L'argent investi dans la violence, s'il l'avait été dans la construction de ce dialogue, aurait certainement été plus utile. Justice est faite? Certainement pas: cette justice-là n'appartient pas aux hommes, il faut des mains beaucoup plus propres que les notres pour la pratiquer.
Ben Laden, c'est un homme lié pour ce qui me concerne, à la musique: un voyage et un concert annulés le 12 septembre 2001 à New York, ces images terrifiantes sur les écrans en descendant dans la rue, le concert reporté au mois suivant, un disque qui naît à partir de cet événement et de ma rencontre au même moment avec Asia Argento. C'est aussi le départ de NYC de mon label, un peu la fin de mes aventures de musicien aux Etats-Unis. C'est encore une série de poèmes nés à cette époque, qui vont paraître dans quelques semaines dans mon livre « Noël Jivaro » (toujours cette manie de l'auto-promotion).
Ben Laden, c'était aussi une étrange ressemblance physique avec mon père, qui lui aussi était barbu, avait des traits de visage similaires, surtout le regard. Les ouvriers qui travaillaient chez lui l'avaient d'ailleurs surnommé Ben Laden, ce qui l'amusait et en même temps, l'énervait. Du coup, il était devenu plus exigeant avec eux et ils avaient cessé de la charrier sur sa ressemblance.
Ben Laden et Bush Jr partageaient des points communs, comme le fait d'avoir pour père une figure écrasante, quasiment indépassable, un boulet qui avait provoqué chez eux une perversion de l'agir, une caractéristique que je peux comprendre, ayant eu moi-même un père à très forte personnalité, peu amène vis à vis de sa progéniture. J'ai compris ce que cela provoque chez un homme, un père absent ou peu aimant. J'aurais pu suivre le même chemin d'inconfort que ces deux-là, quelques étages plus bas, mais j'ai rencontré cet ami dont j'ai parlé.
J'espère que la mort de Ben Laden va être pour les artisans de haine, l'occasion de réfléchir sur leurs motifs, et pour ceux qui les combattent, l'occasion de réfléchir aux motifs de cette haine qu'ils suscitent. J'espère que les États riches vont cesser d'intervenir dans les affaires des pays pauvres, que les régimes autoritaires vont continuer à être renversés ou bien apprendre l'ouverture (oxymoron), ce que l'Égypte, la Côte d'Ivoire, la Tunisie et d'autres encore s'apprêtent on l'espère, à découvrir.
L'avenir est à la démocratie et à la non-ingérence: ne créons plus les monstres qui nous ressemblent.
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